Sergent Koehl : " Vous avez vu les Vostroyens sur l'aire d'aterrissage, lorsqu'on a été frôlé par des projectiles ennemis ? Ils ont beau préparer leurs aînés à la guerre et leur confier un équipement des plus performants, une fois sur le terrain, ils ne valent pas mieux que des paysans. "
La colonne de soldats noirs et masqués qui entrait au coeur de Victory Bay chantait, comme n'importe quel régiment de la Death Korps, à la gloire de la mort. Ils chantaient au nom de la mort. Tous savaient que mourrir au combat était le plus grand service qu'ils puissent rendre à Krieg et à eux-mêmes. La plus grande gloire qu'on puisse atteindre.
Le Sergent Koehl, du vingt-cinquième peloton, n'avait, comme tous ici, jamais été au combat à proprement parler. Pourtant, le crane humain qu'il portait à la taille et la ceinture d'ossements qu'il avait intégré aux lanières de son harnachement prouvaient qu'il avait déjà tué. Surement un lâche ou un faible. Peut-être même un hérétique qui divaguait en déambulant dans les couloirs. Puisse son âme pourrir en enfer !
D'un côté, le fait qu'une partie de ses ossements aillent au combat avec le sous-officier le rachetait à moitié.
Le soldat Agantyr faisait partie du vingt-cinquième peloton de la troisième phalange du neuvième régiment de Krieg. A vrai dire, le deuxième. Mais les régiments ayant trahi durant l'Hérésie de l'Autarque avaient été bannis. En tout cas, comme n'importe qui ici, son visage était caché par son masque à gaz, et il ricanait à la plaisanterie de l'homme de tête avec tous les autres. Au fur et à mesure que l'arrière du peloton transmettait les paroles du Sergent au peloton suivant et que le peloton précédent comprenne également, et ainsi de suite jusqu'à ce que tout le régiment ne se mette à rire, Salem sentait que cette plaisanterie était aussi un avertissement. " Reculez comme eux, et je vous abats, lâches ! " Lâche. La pire insulte, le pire reproche, le pire déshonneur qu'on puisse connaître.
Salem Agantyr : " Dis-moi, Raymi. Tu as vu le jeune ? "
Raymi Heinligen : " Le gars corpulent du vix-huitième ? "
Salem Agantyr : " Lui-même. "
Raymi Heinligen : " Je suis pas sûr. Mais Grach, du dix-huitième, m'a dit qu'on l'avait exécuté à l'aterrissage. "
Salem Agantyr : " Ca m'étonne pas. Tant mieux ! Je ne pouvais pas supporter de savoir cette espèce de hippie à mes côtés. On combattra mieux. Que son âme soit damnée. "
Raymi Heinligen : " Que son âme soit damnée. "
Les hommes arrivèrent bientôt à la base principale du gouverneur Alexander. A ce qu'il paraissait, Alexander était plutôt jeune, mais sa foi, son courage et sa détermination étaient exemplaires. Il aurait pu faire partie de la Death Korps. Le Colonel Vogel, commandant en chef du régiment, fit signe aux chefs de corps de stopper la marche. D'un seul mouvement, les premières lignes s'arrêtèrent, tandis que, sur le premier " palier " de la colline, les autres phalanges venaient se mettre au garde-à-vous à leurs côtés. De chaque côté du passage, une statue de l'Immortel Empereur, colossale. " The Emperor Protectis ", était-il marqué. L'Empereur protégeait les âmes de ses soldats. Ses soldats défendaient de leurs corps l'Humanité toute entière. On avait dit à Salem que les Spaces Marines du Chapitre Blood Ravens étaient présents. Mais à ce qu'il paraîtrait, ceux-ci seraient touchés d'hérésie. La découverte d'antiques reliques sur leurs origines les avaient rendu fous à lier. Ils voulaient massacrer tout le monde, alors que Terra avait expressément demandé à ce que la planète soit reconquise et réintégrée dans sa totalité à l'Imperium.
Le Colonel passa entre les immenses statues de pierre. A leurs côtés, le Titan Imperator, inspecté par quelques Technaugures de Mars, reconnaissables à leurs capes écarlates, sommeillait paisiblement. Les Kasrkins cadiens refermèrent le passage, leurs radiants chargés. Ils avaient sûrement eu l'ordre de tirer à vue sur quiconque s'avançait trop près du sommet de la colline, et donc de la base principale du gouverneur et du Titan. Les hommes de Krieg se mirent au repos et leurs triplex noirs allèrent reposer sur leurs jambes droites. Ils se demandaient tous s'ils allaient être envoyés au front ou s'ils allaient passer la nuit par ici, voire plus. Et s'ils étaient envoyés... contre qui ?
En tout cas, une fois le Colonel passé hors de vue, on laissa au régiment des gardes en noir le loisir de faire comme chez lui. Même si les choses à Victory Bay, et sur Kronus en général, mis à part en Péninsule de Deimos, étaient très différentes de ce qu'on pouvait trouver sur Krieg, les soldats s'efforcèrent de rompre les rangs et de se disperser, généralement par groupes de cinq à vingt. Aucun d'eux ne défit son masque. Les hommes de Krieg étaient si habitués à leurs masques qu'ils hésitaient souvent à l'enlever de peur de leur réaction face au contact direct avec les éléments. Peut-être se l'autoriseraient-ils en passant dans un bunker, qui savait. Salem se dirigea, quant à lui, seul, vers un groupe de gardes cadiens qui discutaient de la situation actuelle. Apparement, tout ce qu'on savait, c'était qu'une Inquisitrice était en train de se démener contre les Tau et les Orks. Intrigué, Salem demanda des explications sur ces deux races. Les connaissances des gardes étant limités, cela fut vite fait.
Salem Agantyr : " Des créatures sans nez à la peau grise ?! Des monstres becquetés ? De grosses guêpes ? Mais que sont ces Tau ?! Et qu'est-ce que cette technologie ? "
Sergent cadien : " Apparement, ce serait un ensemble de plusieurs races. "
Salem Agantyr : " Infect ! "
Garde cadien : " Ouais. J'ai vu leurs armes à Pavonis. La plupart ressemblent à des lance-plasma, mais c'est différent au moment de l'impact. Les Kroots, leurs alliés verts, utilisent des fusils rudimentaires. Mais il hachent menu, sautent et griffent, dévorent les chairs. Leurs amis frelons, c'est pareil. "
Salem Agantyr : " Et les Orks ? "
Sergent cadien : " De grosses bestioles à la peau verte qui passent leur temps à faire la guerre à tout le monde. De sacrés morceaux ! Si tu en croises, tu ferais bien de ne pas être seul. Ce sont des barbares... "
Salem Agantyr : " Je vois. "
Il y eut un bref silence. Un des gardes, apparement un rescapé au vu des blessures qui cicatrisaient sur son visage, annonça qu'il allait chercher du bois pour faire un feu. On le rejoindrait plus bas. Les soldats se levèrent donc pour se diriger vers le palier le plus bas. A l'abri derrière les tourelles à bolters, ils n'en oublièrent pas, cependant, de charger leurs triplex et pistolets.
Sergent cadien : " Un groupe de jeunes inexpérimenté s'est fait éliminer par des infiltrés Eldars, ici. "
Salem frissona. On lui avait expliqué le Warp, le Chaos et les Eldars durant le voyage. Mais il y avait une question qui lui trottait en tête. Sa voix, à moitié déformée par son masque, articula une nouvelle question.
Salem Agantyr : " Est-ce vrai que les Space Marines nous ont déclaré la guerre ? "
un malaise passa parmi les hommes, et c'est celui qui était allé couper du bois qui, revenant avec un tas de branches sèches, répondit.
Rescapé : " Tu vois mon visage ? C'est un Blood Raven qui m'a fait ça, à Panrea. Ils y font parfois quelques incursions. Malheur à qui s'y trouve alors. Depuis leur castellum, ils contrôlent Panrea et Pavonis dans une certaine mesure. Ils ont déclaré que ce monde devait être purifié. L'Inquisition n'a pas autorisé l'Exterminatus, penses-tu ! Cette planète, on est sensé la nettoyer pour la rattacher à l'Imperium. Mais ils se sont obstinés. Alexander a refusé de partir tant que la sorcière eldar ne serait pas morte et Kronus pacifiée. Les combats qui ont eu lieu alors ont été sanglants. On les a repoussé, mais les machines sans âme et les traîtres en ont profité. "
Garde cadien : " J'ai entendu le Commissaire Gebbet parler d'une armée de sans âmes qui se masserait à Eres. "
Sergent cadien : " C'est tout près, ça... Les Vostroyens ont déjà été envoyés à Eres, je crois ? Bon... En fait je crois que nos amis de Krieg vont être largués à l'astroport. "
Salem Agantyr : " L'astroport ? "
Rescapé : " Apparement, le vieil astroport de Pavonis recellerait une vieille relique de l'Adeptus Mechanicus qui, si on en prenait le contrôle, pourrait permettre à nos vaisseaux d'avoir une couverture radar très performante. De quoi prendre un net avantage, en somme. "
Sergent cadien : " Mais il nous faut pour cela capturer les serviteurs d'un Technaugure qui a séjourné sur Kronus, et ceux qui ne sont pas cachés sont éparpillés dans les campements de bataille de l'Imperium ou des Tau. Même les sans âmes semblent s'y intéresser. Mais eux... pour le détruire. "
Raymi Heilingen : " Et le pire, c'est que des capsules de Space Marines viennent de débarquer. "
Tous les présents se retournèrent vivement vers le soldat Heilingen, qui, comme à son habitude, n'avait pas pris la peine de signaler sa présence et d'éviter une frayeur à ses acolytes. Par mesure de précaution, il avait d'ailleurs gardé le doigt sur la gachette, afin de rendre à un malotru sa salve de laser en cas de dernier recours. Salem lui fit signe de s'installer, l'invitant de fait à raconter ce qu'il avait entendu.
Raymi Heilingen : " On n'a pas vu à qui ils étaient. La bonne nouvelle, c'est que ce ne sont pas des Blood Ravens. "
Salem Agantyr : " Et la mauvaise, c'est qu'on n'a, du coup, aucune menace directe à affronter. "
Raymi acquiesca, et les Cadiens regardèrent les deux hommes masqués, interloqués. Mais quel genre de fou pouvait bien avoir hâte de combattre un des Meilleurs de l'Empereur ? C'était de la folie pure et simple ! C'était... c'était la mort assurée pour un novice.
Salem Agantyr : " Tu le sens comment ? "
Raymi Heilingen : " On part ce soir inspecter sur cet évènement dans les terres centrales de Pavonia. Si l'on ne trouve rien de spécial, on avancera peut-être vers Pavonis. "
Salem Agantyr : " Parfait. "
Ce fut bientôt l'heure du repas. Salem, Raymi et la quarantaine de Cadiens qui encerclaient maintenant le feu, serrés les uns contre les autres, échangèrent un repas frugal, fait d'une écuelle de soupe au lard et d'un morceau de pain, suffisant pour voler au petit contenant métallique la moindre trace du liquide brulant. A partir du moment où il arrivait sur un champ de bataille, le soldat de Krieg devenait plus renfermé, plus serein. Il se passait des gestes et des paroles superficielles et profitait de chaque instant à sa juste valeur. Il savait alors qu'il mourrait bientôt, et qu'on honorerait silencieusement sa mémoire.
Puis, les Cadiens se retirèrent, et allèrent passer la nuit, pour ceux qui n'étaient pas de quart, dans les souterrains de la base. Salem et Raymi, quant à eux, rejoignirent les leurs pour prendre les nouvelles. Comme le pressentait Raymi, ils partaient dès à présent en direction des terres centrales, à moins d'une journée de marche. Ils devaient y être en milieu de matinée, et rejoindre la zone de larguage de la capsule des Space Marines aux environs de midi. Il fallait avant tout qu'ils sachent qui ils étaient et ce qu'ils venaient faire là. Aux couleurs, on avait pensé aux Ultramarines, mais la touche écarlate avait fait changer d'avis au gouverneur Lukas Alexander et à son sinistre second, le Commissaire régimentaire Anton Gebbet. On planchait maintenant pour les Crimsom Fists. Un Chapitre des plus vénérables, mais réputé pour être impitoyable. Si un nouveau Chapitre s'engageait, il fallait savoir lequel, pourquoi et avec qui.
Dans la nuit noire à la couleur d'encre, un bataillon des soldats noirs traversa le pont Victoria et quitta la capitale impériale. Elle prit plein ouest et s'enfonça par une route cahoteuse, empruntée par de nombreux chars et autres blindés, dans la forêt voisine. Le bataillon était accompagné de deux Hellhound et de trois Sentinelle. Un Hydra suivait, en cas d'attaque aérienne. Enfin... Les régiments de Krieg aimaient aussi parfois l'amener sur les lignes de tir, afin de profiter de son canon DCA sur l'infanterie et les blindés adverses. Disons donc qu'il était aussi un gage d'efficacité face à un ennemi trop encombrant. S'ils croisaient des Orks... Que leur âme brûle en enfer.
[Direction : Les Terres Centrales de Pavonia.]
Sujet: Arrivée de la Death Korps de Krieg sur Kronus. [Déjà fini !] 